Rendez-vous des 6 semaines, face à ma sage-femme, j’ai pleuré.
Oh non, pas à chaudes larmes. Ça c’était déjà fait.
Lorsque le diagnostic a été confirmé. Lorsqu’ils nous ont dit devoir t’emmener. Sans nous. Sans moi. Lorsqu’ils nous ont raconté comment ils allaient procéder. Lorsque je me suis réveillée, le jour d’après, et réalisé que tout ça, c’était “pour vrai”. Et encore plus peut-être, le jour d’après. Quand, à l’entrée du bloc, on s’est fait doubler. Mais aussi lorsque j’ai du t’y laisser.
J’ai pleuré quand je t’ai vu, juste après. Quand il m’ont dit que dans 2 jours seulement, ils te réveilleraient. Puis quand les yeux ouverts, je t’ai retrouvé. J’ai pleuré quand l’examen a été mauvais. Quand j’ai cru que, bien plus longtemps encore, à l’hôpital, on resterait. Les jours qui défilaient. Sans toi. Sans moi. Sans “nous”.
Les choses bêtes, aussi, j’ai pleuré. Les vêtements préparés que tu n’allais pas porter. Les photos qu’on n’a pas fait. La chambre si bien préparée, dans laquelle, un peu plus, on aurait du rester. Le joli berceau, que je voulais immortaliser.
J’ai pleuré pour toi, pour moi, pour lui. Pour ton frère que j’ai du laisser. Mais aussi les soirs où c’est toi que j’ai “choisi” de quitter.
J’ai pleuré que ton frère ne sache pas encore qui tu es. Que tu ne saches pas qui il est.
J’ai pleuré d’être là mais si loin. D’être là mais de n’être rien.
De t’avoir si mal fait. De ne pas avoir su te protéger. De ne pas savoir comment t’accompagner.
J’ai pleuré de ta tête piquée, et de mes bras vidés. De te voir finalement si bien manger, malgré tout ce qu’on nous annonçait. De te trouver si parfait.
Mais ce jour là, si j’ai pleuré, ce n’était pas à chaudes larmes, oh non, loin de là. Une goutte à peine s’est échappée, juste comme ça, hors de moi. J’ai écouté ma sage-femme m’interroger. Me demander comment ça allait. Je me suis entendue, pleine de retenue, faire croire que tout ça, je ne l’ai pas si mal vécu.
Et puis, sa version des faits, elle m’a racontée. Cherché à savoir, si elle avait bien fait.
Mais si elle savait, ô combien elle a bien fait !
Elle a su nous accompagner, puis t’accompagner. Elle a su détecter, sans tarder. Puis nous informer, sans trop nous alarmer. Elle nous a guidés, dans cette longue journée. Elle a vu et entendu, les cris, les pleurs, la joie puis le désespoir. Elle m’a aidée, pour avoir moins mal, et t’a fait sortir du noir.
Et ce jour là, si j’ai pleuré, ce n’est pas que de l’entendre me raconter. Mais dans ses yeux, j’ai trouvé cette lumière qui disait ô combien elle savait. Je l’ai entendu me parler de cette tétée qu’elle m’a fait te donner. Et je crois bien que je l’avais oubliée. Elle m’a expliqué s’être interrogée, à savoir si elle devait le faire. Elle a voulu confirmer le doute, qui en elle subsistait. Mais surtout m’offrir, t’offrir, nous offrir, ce moment de “normalité”. Parce que je crois bien qu’en vrai, pour sûr, elle savait. Et puis elle m’a dit que “C’était important, avant le chaos qui vous attendait, parce que oui, je le sais, ô combien c’est devenu le chaos, juste après”.
Alors j’ai pleuré. J’ai pleuré parce que, elle, elle le sait. Elle sait le chaos, et le jour d’après. Elle savait ce qui nous attendait. Elle sait que tout ça nous est arrivé. Je n’ai pas eu besoin de lui raconter. Elle sait que l’insouciance, c’est terminé. Et malgré tout, elle a su me rassurer. Oh non, pas sur le fait que ça ira mieux après. Que ça sera vite derrière. Mais bien sur ce qui est le plus dur en vrai. Sur ces premiers moments, que je croyais volés, envolés, disparus à jamais, mais qu’elle a su me rappeler, parce que si, ils sont arrivés. Pas comme on les aurait imaginés. Pas comme on voudrait qu’ils se soient passés. Mais qui méritent qu’on s’en rappellent pareil. Parce que cet instinct maternel, cette présence que tu méritais, celle que j’ai bien cru ne pas avoir su / pu te donner, elle m’a dit les avoir pourtant vus, de ses yeux, en vrai.
Et puis j’ai rejoint des copains, qui ce jour-là repartaient. J’ai lancé qu’elle a réussi à me faire pleurer. Et on en a rigolé.
Pensant que le chaos, c’était terminé. Ne sachant pas, que ça recommencerait.
Et pourtant, aujourd’hui, on sait. Ces choses là qui n’arrivent jamais. Pour lesquelles, on se prépare, sans y croire en vrai. Parce qu’on n’est jamais vraiment prêts.
4 Blabla ! sur "Et puis, j’ai pleuré"
Tu es une fille très forte, très courageuse et une vraie battante, comme Dimitri 🙂
Je ne sais pas ce qui vous est arrivé mais toutes mes pensées vont vers toi et ta famille. Ton article est très touchant.
J’ai été très touchée par ton article, moi qui lisait et me reconnaissait dans ce que tu décrivais de ta 2ème grossesse. Je ne sais pas non plus ce que vous vivez mais je vous souhaite de traverser ce moment douloureux et de rencontrer sur votre route de belles choses.Bon courage
Tu es une battante copine tout comme ton petit Nemo !! je vous admire <3